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"Six pieds sur Terre"
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7 février 2008

Maroc : victimes des années de plomb

Pendant plus de 30 ans, des Marocains ont été emprisonnés et torturés sous le régime d'Hassan II. MdM soutient les survivants de ces années de plomb. famille_el_manouzi_blog“Je m'occupe d'un homme qui a passé 10 ans en prison. Il a été torturé. Il a la tuberculose et personne ne le prend en charge. Il n’a pas de famille. On l’a conduit dans un hôpital psychiatrique mais ce n'est pas sa place. Rien n’est fait pour que ces personnes aient accès aux soins. Beaucoup se sont retrouvées à la rue sans rien après leur libération ou dans des taudis sans eau ni électricité, avec de graves troubles psychologiques”, explique Rabia El Bouih, assistante sociale au centre d'accueil et d'orientation de l’Association médicale de réhabilitation des victimes de la torture (AMRVT) à Casablanca. En 1991, Hassan II, roi du Maroc, ouvre les bagnes du pays après plusieurs décennies de répression. Près de 50 000 personnes sont libérées mais toutes sont brisées par des années de torture. "Les détenus arrivaient tout juste à marcher. Certains avaient été emprisonnés à 20 ans et ressortaient à 40. Les agents de l'Etat avaient carte blanche pour torturer", explique Jean Beckouche, responsable de mission MdM. En 2005 naissance du partenariat entre l'AMRVT et Médecins du Monde. "L'objectif était de faire connaître notre association et nos revendications auprès des organisations internationales mais aussi d'obtenir un soutien financier de MdM et de bénéficier de son expérience en matière d'aide aux victimes de torture", explique le président de l'AMRVT, le Dr El Manouzi. Depuis 2001, l'association marocaine a un centre d'accueil et d'orientation à Casablanca destiné à palier l'absence de prise en charge médicale et psychique des victimes de la torture et de la détention arbitraire, comme en témoigne Saïd, apprenti bijoutier arrêté à tort en 1981 : « Libéré en 1991, l’association m’a soutenu médicalement et prend en charge depuis 4 mois mon suivi psychologique. Sans ça, je ne pourrais pas me soigner car je n'arrive plus à travailler. Ma vie est un enfer. " Depuis 2003, l'Etat a reconnu sa responsabilité. Le nouveau roi, Mohammed VI, a mis en place des auditions publiques de victimes dans le cadre de l'Instance Equité Réconciliation. Un accord pour une couverture médicale a également été signé cet été. Ce dispositif est applicable depuis septembre. "Il faut attendre. Certains survivants ont été indemnisés mais pas tous. Et beaucoup ne peuvent supporter les frais des traitements médicaux et psychothérapeutiques", précise le Dr Ben Houssa El Mostafa, psychiatre de l'association. MDM n'a pas envoyé d'expatriés au Maroc mais des experts. Plusieurs séminaires de formation ont ainsi été organisés entre 2006 et 2007. " MdM, des professionnels de la santé des hôpitaux publics et des membres des associations marocaines des droits de l'homme ont conjointement participé à la formation des soignants du centre. Cela nous a permis de renforcer notre réseau. Nous avons appris à aider au mieux les victimes, à les écouter, à les recevoir", explique le directeur du centre, Moustafa Louzi. L’indispensable soutien psychologique Le centre d'accueil de Casablanca est le seul lieu où les victimes peuvent trouver un soutien psychologique et médical gratuit. "La plupart des membres de l'ARMVT ont un lien avec ces années de plomb. Certains ont été arrêtés, torturés, d'autres ont un membre de leur famille concerné. Cela aide pour entrer en contact avec ces patients qui souffrent essentiellement de troubles psychiatriques, digestifs, de problèmes de vue, de maladies pulmonaires ou rhumatismales", souligne le Dr Abdelfattah Marzouk qui a connu la détention. Plus d'une dizaine de personnes est accueillie chaque jour dans ce centre et plus d'un tiers d'entre elles fréquente l'unité psychiatrique initiée fin 2006 ainsi que l'unité de kinésithérapie créée en 2007. "Nous suivons 66 patients en psychiatrie. Ces personnes ont été séquestrées, torturées dans des lieux secrets, les yeux bandés. Le but était de leur faire perdre tous leurs repères. Le traumatisme lié à la torture est important avec, en plus, une rupture familiale et sociale. La personne a perdu son travail, ses ressources. Les bâtiments de l'administration symbolisent l'Etat et donc la torture. Beaucoup ne veulent même pas y entrer pour des papiers. Sans oublier qu'il y a encore des tortionnaires impunis au gouvernement...", raconte le Dr Ben Houssa El Mostafa. "Ces phobies vis-à-vis de l'administration sont frappantes. Nous assurons beaucoup de psychothérapies individuelles mais aussi de couples car souvent le dialogue est rompu et la victime sombre dans la dépression", ajoute Hakima Douchy, psychologue du centre. Marie-Pierre Buttigieg
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